L'Église d'Échilleuses

Vue de la nef centrale
Vue de la nef centrale - © J.Richet

Appartenant au diocèse de Sens doyenné du Gâtinais, l’église d’Échilleuses est dédiée à St Médard et St Christophe. Elle s'inscrit dans un rectangle de 26m sur 13. Elle est composée de trois nefs divisées en cinq travées.
Chevet plat, clocher sur la deuxième travée du bas-côté sud, comme on l'a beaucoup pratiqué dans la région au XIIIème siècle.
C'est un monument ample et qui parait tout simple.

L’extérieur

L’extérieur révèle peu de choses, sinon que le clocher par ses proportions est du XIIIème, mais que la tour a été visiblement refaite au XVIIème.

La façade ouest présente un beau portail roman orné de 4 chapiteaux à figures: 2 acrobates à gauche, une méduse (?) et 2 personnages qui se tiennent par la main à droite. Le chapiteau à la méduse, qui n’est pas sans rappeler certains chapiteau de Vézelay. Ils donnent l’impression de se livrer une partie de bras de fer. Ils semblent dater de la première moitié du XIIème, voire légèrement plus tard. Les 2 colonnes ont un profil inattendu: il suit l’angle dans lequel elles sont logées.

Cette facture n’a pu que compliquer la tâche des tailleurs de pierre. c’est donc un effort volontaire, peut-être pour éviter de créer un vide trop grand ?

L’ensemble a conservé quelques traces de peinture rouge. La façade a été visiblement reprise, car l’appareil n’est pas homogène. On voit la trace d’un auvent. Une baie du même type que le portail le surmonte, comme il est d’usage à l’époque romane. On peut donc penser que le centre de la façade, remonte au début du XIIème. Peut-être a-t-il appartenu à une première église, reconstruite au XIIIème pour l’agrandir ? Sinon il faut admettre que cet ensemble portail et fenêtre aurait été fait au XIIIème, ce qui n’est guère vraisemblable. Reste la possibilité d’un portail provenant d’ailleurs – mais d'où ?

L’intérieur

L’intérieur au premier coup d’œil, paraît homogène et aussi simple que l’extérieur. Les baies sont simple, XIIIème, mais un examen plus minutieux des voûtes, nous compliquera les choses: les 2 piliers 55 et 56 au fond de la nef, sont couronnées de beaux chapiteaux XIIIème, ainsi que le pilier. Tous les autres, qu’ils soient à facettes ou à bague, sont du début XVIème.

La même différence se trouve avec les voûtes: Les nervures des travées 6 et 11 dans le cœur, ont le profil en boudin à gorge profonde du XIIIème

Dans la travée 7, les choses sont plus complexes (Voir plan ci-après) : à l’Est les arcs sont comme en 6, à l’Ouest comme dans tout le reste de l’église, ils sont en V, donc XV – XVIème. Il est très visible qu’il y a eu reprise en sous-œuvre.

Les choses sont donc claires, puisqu’il y a des éléments XIIIème aux 2 extrémités de l’église, c’est que comme son plan le suggère, elle est entièrement du XIIIème et a été voûtée à l’origine, au moins au niveau des 2 premières travées Est. Mais une restauration des voûtes et même des piliers a été nécessaire presque partout au début du XVIème. Il est vraisemblable que l’église n’a pas été entretenue, voire a été endommagée au cours de la guerre de cent ans.

Quant à la base du clocher, massive, solide, elle appartient bien au XIIIème mais sa voûte a été reprise au XVIème et présente de fort jolis culs-de-lampe. L’escalier du clocher est un ajout, ce qui confirme que la base est antérieur; si le clocher avait été entièrement édifié après le XVème, l’escalier aurait été incorporé dans le plan initial. Enfin, la sacristie est un ajout, et sa porte datée 1683, est un bel exemple du style du début du XVIIème, qui a perduré dans nos campagne jusqu’en plein règne de Louis XIV.

 

Le mobilier

Les bénitiers, les fonts baptismaux et les pierres tombales

Le bénitier de 1693 (58) est un beau chapiteau à la limite du roman et du gothique. 4 larges feuilles s’enroulent en spirales aux angles. l’ensemble est aussi sobre qu’élégant. Il existe aussi un bénitier de 1697 (57)

Les fonts baptismaux du XIIIéme (66) se trouvent au pied des éléments de la poutre de gloire (64) à savoir le Christ sur sa croix entre Marie à gauche et Jean à droite.

Les pierres tombales sont nombreuses. Les grandes dalles de l’allée centrale en sont certainement. Plusieurs ont conservé des inscriptions.
Une tombe familiale du XVIIème ou XVIIIème, au milieu de la nef: la formule est au pluriel – requiescant – (qu’ils reposent en paix).
Une dalle sciée dont un fragment est devant la sacristie (26). Le décor évoque les années 1360-1370. On devine un personnage. Ses armoiries restent lisibles, à l’exception du franc-quartier dextre. Le nom a été soigneusement et proprement éliminé de deux traits de scie. Des fleurs de lis de style XVIIème ont été rajoutées, témoins d’un réemploi à cette époque. La dalle était encore entière alors puisqu’on les retrouve sur l’autre fragment. Le découpage doit donc dater de la révolution. (pierre tombale de Guillaume d’Eschilleuses mort en 1313/1323 – note de la rédaction)
Datée d’aout 1782, la dalle de messire de Longpont, Boësse et Eschilleuses.
Sans inscription, signalons également une dalle marquée d’une croix, entre les piliers 46 et 47.

Les boiseries et les statues

Tout le mur Est a été habillé d’un retable du XVIIème, ample et digne. Parfaitement homogène, c’est un bel exemple des aménagement du temps, qui a bénéficié de toute la largeur des trois travées pour développer ses fastes, ce qui est exceptionnel. Tous les détails sont intéressants. Le médaillon central (photo ci-dessus) représente Dieu le Père, la main gauche sur un globe, émergeant d’un nuage parsemé d’angelots. Ce n’est pas un sujet très souvent abordé en dehors des XVème et XVIIème siècles. Ce retable mérita donc un double examen. a/ Un regard d’ensemble pour en apprécier la structure et les équilibres subtils entre le maitre-autel surmonté d’un fronton plus élevé et plus orné, et les autels latéraux. b/ L’observation minutieuse des détails finement ouvragés.

Cette église possédait également une poutre de gloire. Cette poutre était placée en travers de la nef à l’entrée du chœur et sur laquelle on voyait un crucifix entre Marie et Jean. Des encoches dans les piliers (37) et (49) marquent son emplacement (Voir plan de l'église en début d'article).

Il est manifeste que le crucifix conservé au fond à droite en entrant (64) en provient. Le tenon par lequel il était fiché dans la poutre est toujours en place. Les deux

 statues qui l’entourent pourraient bien avoir la même origine.

Ce sont des œuvres paisibles, d’une grande dignité, bien caractéristiques de la piété du Grand Siècle. A coté, un St Christophe, probablement contemporain, d’une belle monumentalité.

Signalons aussi un tableau – un évêque et un diacre martyr (61), un vitrail du début du siècle (XXème) au dessus de la porte (63), celle-ci a l’intérêt d’être datée – 1779, ainsi que le tambour – 1870, et de nous livrer quelques noms, un magnifique confessionnal, une très belle descente de la croix, des statues, des oriflammes etc...

Les reliques de Saint Maurice

Elles se trouvaient au beau milieu du retable et maintenant en lieu sûr. Elles contiennent une vertèbre avec un petit papier où il y a de noté “ S. Mauritius mar.” et un tube en verre contenant des cendres et fragments d'os; avec un texte: Cendres et fragments d'os détachés des Reliques de St Maurice, relevés dans le reliquaire paroissial lors de sa remise à propre - P.B. 24.XI.1947 

Synthèse

Nous avons donc un monument du XIIIème, particulièrement ample, précédé d’un portail XIIème. Presque toutes les voûtes et le clocher ont été refaits au XVIème et les baies du chevet ont été condamnées au XVIIème pour ménager un retable. La poutre de gloire était contemporaine. Chaque époque nous a légué de beaux éléments sculptés: chapiteaux XIIème, bénitier, chapiteaux XIIIème, culs-de-lampe XVIème, statues XVIIème.

Beaucoup de paroisses seraient heureuses de posséder un tel édifice !

Pour faire suite à ces informations, quelques remarques de Pierre Claude Chevillard, curé d’Échilleuses de 1725 à 1757

L’abbé Chevillard dans ses remarques annuelles, relate un incendie survenu le 11 novembre 1731 à Eschilleuses, allumé par Jeanne Thiercelin, veuve Toutain, qui cuisait pour les paroissiens. Les cendres chaudes de son four avaient mis le feu à la couverture de chaume, et comme le vent était fort grand, l’ayant porté dans la maison des Bizet, le feu se répandit sur toute la rue et Estienne Médard, Pierre Laroche, Jules Grégoire, Charles Pillu, la veuve Marjollet et Antoine Camus eurent leurs maisons incendiées. Le curé qui par parenthèse, ne manquait pas de linge, avait mis dans un puits, au commencement de l’incendie, 48 draps, 10 douzaines de serviettes, 3 douzaines de nappes et des ustensiles de vaisselle en étain ; il ne les retira point sans dommage, car le feu prit dans le puits. La vaisselle fondit en partie et il y eut 3 douzaines de serviettes, quelques nappes et 5 draps de brûlés. La servante du curé subit une perte d’environ 100 francs.


Un second incendie encore plus terrible que le premier, survint le 12 aout 1738. Il n’avait pas plu depuis le 4 juillet et les toitures en chaume offraient un aliment facile au fléau, qui atteignit 42 ménages ; 5 personnes furent brulées ou étouffées. Le feu avait été mis involontairement par des cendres chaudes, comme la première fois, par la femme de Charles Branché, qui cuisait pour le public. 3000 nombres de blé (un nombre comprend 12 gerbes) 1200 nombres de sainfoin, beaucoup d’herbe de safran et d’autres fourrages, 6 vaches, quelques veaux et des porcs, furent la proie des flammes.


Le texte est tiré du fascicule de l'association CSP (Connaissance et Sauvegarde du Patrimoine) sur Échilleuses en 1990 et de l'essai historique sur Eschilleuses d'Alfred Charron en 1912. Revu, corrigé et complété en 2022.

Un film sur la restauration en 2018/2019 de la toiture sud de l'église est disponible en cliquant sur l'adresse ci-dessous :

https://www.youtube.com/watch?v=hupFMq9aS8U

Infos pratiques

Église
Place de l'Église
45390 Échilleuses

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